Petite causerie pédagogique n° 29

Aujourd’hui : le moment des Chefs-d’Oeuvre Pédagogiques

Hier matin, ce n’était pas un matin comme les autres. Le premier Chef d’Oeuvre pédagogique allait avoir lieu. Les mots ont toute leur importance ; il n’allait pas être présenté, effectué, jugé. Il allait avoir lieu, c’est-à-dire prendre place dans l’histoire de la Maison des Enfants. Place méritée, estimée et reconnue par les enfants et les adultes qui comprennent et entendent toute l’importance du cheminement effectué. Pour illustrer mon propos, je livrerai trois interventions, parmi d’autres bien bien sûr, dont la première vient d’un tout petit.

Il vient me trouver en me disant qu’il sait déjà son sujet, qu’il veut bien me le dire à condition que je tienne le secret. J’acquiesce et il me le glisse à l’oreille (vous n’en saurez pas plus, sinon, ce ne serait plus un secret…). J’écoute attentivement et me dis qu’il est certain que dans six ans, il aura changé d’envie et d’avis. Ce qui est tout aussi certain, c’est qu’il a déjà compris l’importance de la symbolique : « Je ne dévoile pas trop mon sujet car je veux le faire découvrir aux autres. »

La seconde m’est adressée dans l’escalier, comme cela, sous des airs de faux airs :

– Jean-François, ce week-end, j’étais en hike lutin et il y avait une « cuistot » qui s’appelait S. Tu la connais ?

– Oui. Elle était élève ici il y a quelques temps.

– Je sais, elle me l’a dit et aussi qu’elle avait présenté son Chef d’Oeuvre sur l’escalade et qu’elle s’en souviendrait toute sa vie. C’est un de ses meilleurs souvenirs. Il est dans la bibliothèque ?

La troisième était plus dirigée mais le résultat inattendu. Un ancien stagiaire, devenu formateur d’adultes en psychopédagogie, me contacte afin de venir visiter l’école avec quatre de ses étudiants. Il me signale son intérêt pour les Chefs d’Oeuvre pédagogiques, ce en quoi je lui réponds qu’il faut d’abord que j’en parle à mes collègues et à l’enfant concerné par la date qui les arrange. Je propose donc à cet enfant de lire le message et de répondre comme bon lui semble à cette demande. Voilà ce qu’il écrit : « Bonjour, je suis Camille, celle qui fait son chef-d’oeuvre sur la danse classique. 

Je serai enchantée et ravie qu’elles viennent voir mon Chef-d’Oeuvre. Ca me fera des spectateurs en plus . Ce serait super  en tout cas, merci d’avance. »

Moi qui suis conscient de l’impact d’une telle pratique, qui suis souvent invité à en faire part, je ne m’attendais pas à ça !

Le Chef d’Oeuvre pédagogique vient de loin, j’ai déjà discouru sur le sujet, de beaucoup plus loin que les examens notés. Par surcroît , il porte en lui des valeurs qui entrent en concordance avec ce que les hommes de bonne volonté portent en eux comme souhait pour eux-mêmes et leurs prochains : pour soi mais en solidarité, précision mais ébauche à parfaire, fierté mais humilité face à la tâche, effort mais plaisir à terme, conscience de soi mais importance de communiquer.

Et puis aujourd’hui, une perle : le Chef d’Oeuvre, il m’a appris à dire NON aux adultes. (dixit)

Décidément, ces moutards m’en apprendront tous les jours.

A méditer et à partager avec qui vous voudrez.

JF Manil